vendredi 22 novembre 2013

Marisol, Vincent et les autres.



Voilà plusieurs mois que je me demande si le gouvernement que nous avons l'honneur d'avoir est incompétent, nul ou complètement déconnecté. 

J'ai du mal à trancher, parce que ça demande tout de même une étude approfondie du problème, et que d'une façon générale, je lis assez peu les journaux d'actualités. D'une, ça me déprime ou m'énerve la plupart du temps, et de deux, c'est en général fort mal écrit. Pendant mon premier congé maternité, je regardais le journal télévisé pendant que l'Héritier faisait sa tétée du soir, mais maintenant que la télé est dans le salon du sous-sol, ça serait trop fatigant de descendre douze marches pour aller bailler devant un présentateur quelconque. Du coup, je compte sur mon mari pour me raconter les trucs importants. Mais enfin, de temps à autres, je tape dans mon navigateur Google "lemonde.fr", parce que faut pas mourir idiot.

C'est comme ça que finalement j'ai pu aboutir à l'idée que ces gens-là sont en effet complètement déconnectés de tout. En se prétendant socialistes et de gauche, ce qui est tout de même un comble. 

Le premier exemple qui m'en a convaincue est la fameuse affaire de la "réforme des rythmes scolaires". Tout le personnel enseignant est contre, ou à peu près, mais ça, le ministre s'en bat les flancs, LUI il SAIT ce qui est bon pour les élèves et l'école. L'écrasante majorité des parents râlent devant cette réforme et décrivent des gamins épuisés ou qui s'emmerdent ferme pendant les heures consacrées aux fameuses zactivités zéducatives. 
Les seuls qui en sont contents ou du moins pas mécontents sont les parents aisés financièrement ou habitant dans une commune favorisée. Forcément. S'ils voient le gamin crevé par les nouveaux rythmes, ils payeront sans souci la nounou pour quelques heures de plus, afin que le rejeton échappe aux zactivités et rentre faire la sieste. Si le gosse n'est pas crevé, il ira aux zactivités, stimulantes et bien fichues, payées rubis sur l'ongle par une commune exigeante et pas près de ses sous. 
Bref, en gros : une réforme faite par des riches pour des riches. Comme c'est étonnant.

L'autre exemple, c'est la déclaration fracassante de Marisol Touraine, qui entend lutter bec et ongles contre la surconsommation d'antibiotiques des Français. Parce que c'est vilain tout plein, depuis le temps qu'on vous dit que les antibiotiques c'est pas automatique, bon sang de bois. 
Sérieux. Sérieux, quoi. Marisol, depuis combien de temps n'es-tu plus allée chez le toubib ? Je veux dire le toubib de Monsieur Tout-le-Monde ? Non parce que moi ça fait bien des années que pour avoir des antibiotiques, je dois quasiment supplier à genoux mon généraliste, qui s'excuse humblement mais que vu comment la Sécu me flique, madame, va falloir vous en passer. La dernière fois que j'en ai eu, c'était pour une sale bronchite doublée d'une vilaine infection, il y a de ça bien quatre ans. La seule fois que mon fils en a eu en deux ans de vie, c'était pour une otite qui dégénérait au point que le loupiot avait l'oreille en sang. 
Alors ta surconsommation d'antibiotiques, Marisol, faut arrêter de la fumer. Va voir comment ça se passe chez le toubib, où tu te pointes avec une sale toux, le nez qui dégouline, les oreilles bouchées et de la fièvre à n'en plus finir, d'où tu repars avec une ordonnance pour du stérimar et du doliprane "et vous revenez si ça va pas dans une semaine". 

Genre ça serait cool de connaître la vie des gens quand on est ministre de gauche. Non ? 

jeudi 26 septembre 2013

Histoire de reprendre.



Rentrée. Nouveau métier, professeur en lycée. Nouvelle vie, nouveau salaire aussi (c'est pas qu'on travaille que pour l'argent, hein, mais quand même).

J'ai de la chance, très objectivement. Des collègues gentils et accueillants, un établissement plutôt pas mal, un proviseur et une administration au poil, une amie déjà "dans la place", des élèves pas bien méchants, un emploi du temps sans trous. Je me tape donc sans trop de râlerie l'heure et demie de bus pour y aller le matin en tombant du lit à 6h, départ 6h30. Ce qui relève de l'exploit personnel, étant donné que me lever avant 9h relève en général de la torture mentale. 

Trois semaines de cours et certaines choses me sautent cruellement aux yeux. 

D'abord, la vacuité des cerveaux des élèves qui déboulent au lycée. L'élève de seconde moyen, en histoire-géo, ne sait pas rédiger un paragraphe. N'a absolument rien appris au collège (et est capable de soutenir mordicus que non, il n'a jamais entendu parler de la guerre de 14-18, et tant pis si vous connaissez son prof de collège qui l'a, lui, pourtant bien enseigné...). Ne sait pas la boucler en cours. Et surtout, a développé un sentiment d'impunité, largement encouragé par ses parents, fondé sur la conviction d'être le nombril du monde, omniscient, génial, parfait. Et d'une manière générale, plus aucun ne sait écrire sans faute d'orthographe. Dernier paquet de copies ramassé, je n'ai jamais trouvé moins d'une quinzaine de fautes d'orthographe par élève. 

Ce qui est difficile, c'est de n'avoir aucune prise sur eux. La menace des notes ? La plupart s'en fichent assez largement. Quand on demande un devoir, en prévenant que ceux qui ne rendront rien auront zéro, vous en avez déjà qui, dès septembre, préfèrent le zéro au fait de fournir un effort, aussi minime soit-il. Idem pour les interrogations écrites sur le cours, où il suffit de réciter : moyenne de 6/20. La menace de l'exclusion ? Ils passeraient pour des héros. Certains sont collés dès la première semaine - j'ai la chance d'être dans un bahut où les sanctions ne sont pas découragées. Rien n'y fait, ils la ramènent toujours autant en cours. Que le CPE ou même le proviseur en personne leur souffle dans les bronches ne change à peu près rien. 

Bref, le système est fait pour des élèves qui seraient gentils, travailleurs, facilement effrayés par la menace d'un zéro ou d'une engueulade de la part d'un adulte. Evidemment, on rigole doucement. 

Que faire avec un élève qui arrive avec un dossier minable, mais qui est passé en seconde grâce au forcing acharné de ses parents qui invoquent la discrimination à tout bout de champ ? 
J'ai aussi un certain nombre de redoublants, pourtant loin d'être idiots à première vue, mais dont la maturité doit à peine dépasser celle de mon rejeton de 18 mois, du genre à être incapable de se taire plus de 5 secondes en cours. J'en ai un autre qui ne parle ni ne bouge en cours (béni soit-il) mais qui a passé tout l'an dernier avec une moyenne oscillant entre zéro et deux. Qu'en faire ? Tous savent parfaitement qu'ayant redoublé une première fois leur seconde, ils passeront forcément en première. 
Je les retrouverai l'an prochain. Ils seront probablement un peu moins bavards, un peu moins agités, le plomb leur entrant progressivement dans le crâne. Mais toujours aussi peu outillés. Et ils passeront en terminale. Et puis, et puis ? 
Je ne peux m'empêcher de me ronger les sangs en pensant à l'avenir de ces gosses qui ne savent même pas écrire une phrase correcte. On nous demande de leur enseigner les mutations culturelles de la Renaissance à ces jeunes gens qui ne savent pas quand a vécu François Ier, ni si c'était il y a longtemps, ni rien. L'angoisse de devoir mener un programme. Il faut voir en quatre heures un chapitre mais, compte tenu du bavardage intense à réprimer en permanence (je refuse de parler dans le bruit, et je perds régulièrement la moitié d'une heure de cours à les faire taire), il en faudra huit pour le mener à bien. Forcément, on ne fera pas tout. Quelle génération de vide sommes-nous en train de forger ? 

J'aime enseigner à ces jeunes gens. Je l'ai su dès la première minute où j'ai commencé à faire cours devant eux. Certaines classes sont chiantes comme la pluie, pourtant j'aime ce que je fais, et l'endroit où je le fais. Je me sens tellement plus utile là que dans mon ancien poste, aussi... mais que faire ? 

Vous me direz : il faut imaginer Sisyphe heureux. 



jeudi 2 mai 2013

Petit oiseau a pris sa volée.



Il grandit, l'ange de quatorze mois qui nous est arrivé un midi de fin d'hiver. Il comprend "va chercher tes chaussures", sait où les trouver, et fait le geste de les mettre. D'ailleurs, quand il veut sortir, il va les chercher dans le placard et tente de les enfiler. Il comprend "montre-moi la balle", ou "il est où ton doudou ?". Se paye allègrement ma tête en refusant son biberon du matin et en le donnant à son ours en peluche. Se débat comme un diable quand il s'agit de lui pschitter son nez bouché, au point que, seule, il n'est plus question pour moi de le maîtriser - d'ailleurs, la nounou a renoncé, m'a-t-elle dit ce matin. 

Il hurle quand on lui retire un objet manifestement dangereux pour lui mais qui a l'air super marrant. Il grimpe sur le canapé, descend, remonte, bondit, tente de ruser pour attraper l'ordinateur ou la DS. Ouvre un tiroir de cuisine, le vide et grimpe dedans comme il adore se planquer dans les cartons de couches vides dont il ne sort, finalement, qu'en valdinguant par terre, secoué de rire, entre paquets de coton, couches, habits, jouets. Il ne me dit qu'à peine au-revoir quand je le laisse à la nourrice le matin, trop pressé d'aller faire les quatre cent coups avec son copain de trois ans. 

Si grand, et si petit. Lui qui se réveille à quatre heures du matin, non plus pour hurler de faim, mais pour une raison plus floue. Je me lève en tâtonnant, le prend dans mes bras et lui dis doucement que ce n'est pas l'heure de se réveiller, qu'il faut encore faire dodo. Il est déjà rendormi dans mes bras, mâchouillant ce doudou à l'odeur redoutable malgré un lavage au moins hebdomadaire, sa petite tête reposant dans mon cou, chatouillé par ses florissantes boucles brunes. 

Si grand, et si petit. Au fur et à mesure qu'il grandit, mes peurs augmentent. La première chose à laquelle j'ai pensé quand je l'ai eu dans mes bras, c'est que j'étais fichue : plus une seconde de ma vie n'allait s'écouler sans que je ne craigne pour lui. Je crains la mort subite du nourrisson, oui, encore - quand je me réveille la nuit pour boire un coup dans la salle de bains, je vérifie par l'entrebaillement de la porte encore s'il respire. Je   crains la maladie. Je crains la mort, l'enlèvement. Je me retourne parfois des heures dans mon lit à l'idée qu'un type entre dans le jardin d'enfants et le subtilise sous les yeux de la nounou. Je pleure de rage quand il s'étale de tout son long sur le carrelage parce qu'il s'est pris les pieds dans l'anse de mon sac pas rangé. Je vérifie douze fois, le soir, que la porte d'entrée est bien fermée, et je me réveille la nuit, hantée par l'idée qu'un cambrioleur qui arriverait à l'étage par l'escalier tomberait d'abord sur sa chambre avant d'atteindre la nôtre. Je soupire de soulagement le soir quand je le retrouve après sa journée chez la nourrice, et en bonne santé le matin. Que ma mère me propose de le prendre une semaine cet été avec son cousin du même âge, je refuse tout net. Hors de question, c'est mon fils. 

Et pourtant, je ne saurais rien lui dire d'autre que "Va, vis et deviens". 




vendredi 12 avril 2013

Ce qui peut se cacher derrière une biographie de Bossuet.


L'autre jour, je lisais une biographie de Bossuet. Qui est un type intéressant, connu essentiellement sur la « réacosphère » pour avoir pondu l'inoxydable « Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes », scie que l'on retrouve à peu près partout à n'importe quel sujet, c'est un peu le point Godwin de la philosophie à deux balles. D'ailleurs, je me demande si, parmi tous ces blogs, il y en a qui sont capables de me citer une autre phrase de Bossuet, et Dieu sait s'il y en a des mieux – le prince de Condé à Rocroy, c'est quand même d'un autre calibre, mais passons.

Bref, sinon, Bossuet est un type intéressant, d'abord parce qu'il a vécu assez vieux, puis très vieux, donc qu'il a vu plein de choses. Ensuite, c'est un animal théologico-politique assez fascinant. L'auteur de la biographie expliquait comment le bonhomme, après s'être roulé dans le gallicanisme en poussant des cris de bonheur dans les années 1660, avait fini dans ses vieux jours par se jeter dans l'ultra-montanisme et dans l'anti-jansénisme forcené. Pourquoi ? Par conviction peut-être (après tout, y'a que les imbéciles qui changent pas d'avis, et pour le coup personne ne dira que Bossuet était un imbécile). Par envie de se remettre en selle, surtout, à un moment où il commençait un peu à taper sur les nerfs de Louis XIV, mais aussi du pape, et de tout le monde en général (car il était un peu pénible, quand même). Bref, histoire de faire parler de lui en bien.

Tout ça m'a fait penser à quelque chose qui me turlupine depuis quelques jours, à propos des dernières convulsions du mouvement anti-mariage entre personnes de même sexe.

Aussi loin que mes souvenirs remontent, Frigide Barjot, j'en ai entendu parler la première fois parce qu'avec son mari, l'innénarrable Basile de Koch, elle était régulièrement invitée à la Fureur du Samedi Soir, la gentillette émission d'Arthur où des personnalités du PAF venaient faire du karaoké. Ensuite ? Ensuite, c'est l'égérie de l'honorable mouvement Touche pas à mon pape, visant à défendre dans l'opinion les propos de Benoît XVI scandaleusement déformés du reste par les média. Et puis, plus rien d'autre, et franchement, rien ne prouve que le monde ait raté grand-chose (n'est pas Bossuet qui veut).

Soit. Mais... Quand même....

Je veux dire, quand la pasionaria du mouvement, à connotation massivement catholique-conservateur, est une nana dont le nom de scène est Frigide Barjot (qu'est-ce qu'on se marre), et dont l'un des tubes (...) est intitulé Fais-moi l'amour avec deux doigts... Qui tient plus de la demi-mondaine sur le retour ? 
Même pour rire (et c'est pas bien drôle, du reste) : ça rime à quoi ? C'est une blague, en fait ? Ou alors elle n'a vraiment trouvé que ça pour faire parler d'elle ? Elle manque tant que ça de notoriété ou de fric ? C'est la crise de la cinquantainte ?

Enfin. Comme disait le philosophe contemporain, Est-ce que ce monde est sérieux ?




vendredi 22 février 2013

Chargez !



J'ai assez peu de sympathie personnelle pour l'ancien président de la République. D'abord je n'ai pas l'honneur et l'avantage de le connaître, alors si ça se trouve il est en fait vachement sympatoche, et si ça se trouve c'est une peau de vache dans le privé. Mais en fait, je m'en fiche. Ce que j'aime bien, en revanche, c'est sa capacité à refiler de l'urticaire à tout un tas de gens qui se tortillent de rage dès qu'ils entendent prononcer son nom, et qui considèrent que Sarkozy c'est à peu près comme Hitler en pire. Je suis toujours en joie quand je vois des gens se ridiculiser, en fait. 
Sarkozy m'a aussi étonnée par sa capacité à cristalliser toutes les haines et les rancoeurs du milieu bobo. C'est quand même un tour de force, de réussir ça aussi bien en si peu de temps. 

Bref, le personnage m'étonne. 

C'est pour cela que j'étais très intriguée par le film sorti il y a quelques années, La Conquête, de Xavier Durringer, qui raconte comment Sarkozy est devenu président en 2012. Si j'ai bien compris, le film a eu un succès d'estime de la part de la critique, mais a souvent été descendu en flèche car il n'était pas assez critique sur le personnage. Entendez qu'il aurait probablement fallu le représenter en tueur de chatons depuis sa plus tendre enfance. 

Ce qui est étonnant dans ce film, c'est d'abord bien évidemment les performances des acteurs. Bernard Le Coq en Chirac, Samuel Labarthe en Villepin tout à fait délectable. On s'amuse à reconnaître Frédéric Lefebvre, Rachida Dati, Claude Guéant et toute la bande. Denis Podalydès est comme d'habitude parfait, mais là il est en plus perfectissime (ça se dit ? ça sonne bien en tout cas). Il est le personnage, son intonation, ses gestes, son look, tout.  Les dialogues sont ciselés, c'est le festival des bons mots. 

Et surtout, il y a le personnage de Sarkozy. Qui apparaît comme l'outsider, celui qui déboule comme un chien dans un jeu de quilles. Celui qui refuse de jouer le jeu du club des énarques et se bat à sa manière, avec ses convictions et un sens redoutable de ce qui marche et de ce qui ne marche pas. Celui qui a son franc-parler à l'emporte-pièce et s'en sert pour moucher avec aplomb les emmerdeurs. Un homme qui n'a qu'une faiblesse, sa femme, à la fois redoutable conseillère et cracheuse dans la soupe, qui pousse son mari à agir puis se plaint de son agitation et en profite pour le plaquer au moment opportun - portrait très réussi d'une pauvre petite fille riche, mais aussi épuisée par son pénible mari qui l'agrippe par le bras et la fait marcher à cent kilomètres heures. 


Bref, j'ai été enthousiasmée par le film. Mais si les mauvaises critiques me gènent profondément, ce n'est pas parce qu'elles trouvent le film mauvais - chacun ses goûts, hein. Non, ce qui est gênant, c'est le côté "c'est nul parce que ça ne démolit pas assez Sarkozy". Un peu comme Habemus Papam avait été démoli par les bobos parce que Nanni Moretti n'en avait pas fait un brûlot anti-papauté. Comme s'il y avait des sujets où il fallait forcément être positionné dans un sens ou dans l'autre. Comme si l'objectivité était impossible. Comme si on ne pouvait pas simplement aimer le cinéma parce qu'il nous raconte des histoires, comme s'il fallait toujours donner la charge. 

 






mercredi 30 janvier 2013

Les brèves du mercredi.



1. Explication. Avant, sur mon ancien blog, il y avait des brèves du lundi. J'ai recyclé le concept sur celui-ci, parce que ça permettait de faire des billets pas trop construits donc pas chronophages, de donner des nouvelles aux copains et de faire des phrases chocs destinées à faire rigoler la galerie. 
Il se trouve que le lundi, j'ai un peu moins de temps maintenant - c'est mon fils qui est plutôt chronophage, on va dire. Du coup, je déplace le concept au mercredi, jour destiné à la garde de l'Héritier. On verra bien si j'arrive à tenir la cadence. 


2. La sociologie appliquée. Il a neigé chez nous, comme chez beaucoup d'ailleurs. Il était plaisant de voir que notre rue se divisait en deux catégories : d'un côté, les plus de soixante ans, qui à huit heures du matin étaient déjà en train de pelleter la neige pour déblayer devant chez eux. De l'autre, les jeunes citadins fraîchement installés à Trou-sur-Banlieue (nous), qui à la même heure prenaient des photos de leur jardin enneigés. La division par âge recoupant du reste assez bien la division entre gens du nord et Provençaux (nous, encore). 


3. Il est toujours amusant d'observer les poussées de mon rejeton, et notamment son rapport à l'autre. Quand il était tout petit, je me plaçais à la messe avec mes copains de chorale, le loustic dans l'écharpe de portage où il pionçait comme un bienheureux. Depuis quelques mois et surtout depuis qu'il marche, je me place avec les "parents-du-fond". Où l'Héritier a repéré une petite fille pour laquelle il s'est mis à faire le guignol, se roulant par terre, et surtout acceptant de prêter son doudou - chose qu'il ne fera jamais même pour moi sa mère. La petite le récompense grassement en sourires. De là à dire que l'Héritier a à la fois tout et rien compris aux femmes du haut de ses onze mois, il n'y a qu'un pas. 


4. Grâce à la médiathèque de Trou-sur-Banlieue, je redécouvre le plaisir des romanciers oubliés dans le vortex du XXe siècle. Notamment Robert Merle dont je viens de terminer le terrible Malevil. Dévoré en trois jours. Il paraît qu'il y a un film, assez mauvais ai-je lu. Dommage. 


5. Les professeurs d'anglais qui passeront par là (il y en a, dénoncez-vous :) ) auront la bonté de m'éclairer sur un point bien précis : pourquoi Elizabeth George appelle-t-elle toujours le personnage d'Helen "Lady Helen" et Thomas Lynley jamais par son titre de lord auquel il me semble pourtant qu'il a droit ? Y a-t-il une signification qui m'échapperait dans cette affaire de titres chez les aristocrates anglais ? Merci d'avance.

mercredi 9 janvier 2013

Hell duck.




Pour Noël, le mot avait été donné : "pour le rejeton, offrez ce que vous voulez, pourvu que ce soit 1 petit (parce qu'après ça doit remonter en train à Paris, et qu'ensuite, la maison n'est pas extensible), et 2 silencieux (pour le maintien en bon état de nos tympans, merci bien).

C'est comme cela que l'Héritier a vu ses chaussons en cuir (ses parents étant bobos à leurs heures) remplis avec
- une petite voiture 
- un trotteur en forme d'écureuil (mais une amie à moi estime que ça ressemble vachement à un lama)
- quatre petites voitures
- deux espèces d'ordinateurs qui font de la musique et qui causent (dont un avec la voix suraiguë et nasillarde de Mickey)
- un train en bois avec des animaux, de taille conséquente
- un mouton à bascule (nan... ne dites rien... en plus, les coupables, c'est nous, pour cette fois). 
- une ferme en bois avec des animaux en tissu. 
- un livre (encore ce crétin de loup qui met sa culotte, ses chaussettes, son pantalon, son pull et son chapeau, tout ça pour même pas réussir à bouffer les gosses qui se promènent dans les bois et le houspillent que c'est pas permis). 

Bref. 

Parents enthousiastes et attentifs, nous avons décidé d'éveiller les sens de notre progéniture en lui apprenant à jouer à ses différents jouets. Et c'est là qu'intervient le drame : l'ouverture de la boîte avec la ferme des animaux dedans. 
Cette ferme se présente sous un jour assez inoffensif, avec des animaux mignons en tissu et un décor choupi. Comme animaux, de façon originale, on dénombre un cheval, un cochon, une vache et l'instrument du diable : un canard. Au départ, c'était rigolo comme tout, on pressait les animaux pour leur faire pousser leur cri. Sauf que le canard s'est mis à brailler sans s'arrêter des séries de 21 "coin" (trois fois sept "coins"), à toute heure du jour et de la nuit, sans même qu'on appuie dessus. 

On a tenu quatre jours, hésitant entre le fait de coller définitivement ledit canard à la cave (mais, une ferme sans canard, ça n'a pas le sens commun) ou faire des trucs plus rigolos du genre le mettre dans la boîte aux lettres pour voir la tête de gens qui l'entendraient en passant (nous avons un sens de l'humour tout à fait délectable, je vous l'accorde). 

Jusqu'à ce dimanche après-midi où, pendant la sieste, le canard de l'enfer s'est remis à cancaner comme un perdu. L'Epoux, n'en pouvant plus, a saisi le canard dans une main et le pilon du mortier à épices dans l'autre, et, en deux coups, il n'y a plus eu de "coin". Sans pour autant que l'esthétique de la bestiole ait été endommagée (un peu comme l'histoire des coups d'annuaires sur les gardés à vue, si vous voulez), de sorte que l'Héritier ne se doute de rien. 

Jusqu'à ce matin, où le loustic a commencé à jouer à faire brailler le cheval, le cochon, la vache... et que le canard, lui, n'a rien émis. L'Héritier m'a alors regardée d'un air interrogateur. Et là, une vague de honte m'a submergée. 

J'ai l'impression que le canard me regarde d'un oeil torve et qu'il prépare sa vengeance.