jeudi 10 décembre 2009

Les objets d'Artémise.


Pour une raison un peu compliquée liée à des affaires de familles peu gaies, la succession de mes grands-parents paternels consista essentiellement en un sauvetage de quelques meubles, livres, vaisselle et rares souvenirs abimés par la maladie et les conflits.

Mes grands parents paternels sont morts quand j'étais adolescente et c'est avec une infinie tristesse que je me rappelle ne pas leur avoir assez téléphoné, écrit, donné des nouvelle, dit que je les aimais.

De mon grand-père, je garde des attaches normandes qui relèvent essentiellement du fantasme (n'ayant mis les pieds que deux fois une semaine en Normandie, et encore même pas du côté du village originel). C'est aussi lui qui m'a permis de récupérer quelques objets ayant appartenu à ma défunte grand-mère. Une bague que je ne porte jamais mais qui me fascinait étant petite, car la pierre principale, une opale, changeait de couleur avec une telle rapidité que ma grand-mère nous faisait croire qu'elle était magique. Un fauteuil crapaud vieux rose dans lequel je m'asseyais telle une princesse lorsque je rendais visite à ma grand-mère. Quelques foulards, quelques bijoux.

Et surtout, un petit marque-page ancien, une pince ornée d'une main décorée de pierres rouges. Du verre coloré, bien entendu. Et du métal doré, rien de précieux.



Cette petite main fait partie de ces petites choses qui me suivent partout. Déjà, parce que je me promène rarement sans un livre dans mon sac à main. Et que, depuis que j'ai arrêté de corner des pages comme une sauvage (parce que sur les livres de la bibliothèque municipale, ça ne se fait pas), j'ai besoin d'un marque-page.



J'ai une tendresse infinie pour cette bricole qui m'accompagne dans toutes mes lectures. Cette petite main, ce sont des générations de lecteurs avant moi. Ce sont des arrière-grand-mères qui lisaient des romans à l'eau de rose, une grand-mère qui lisait du Georges Duby (un ami de la famille) et un grand-père qui épluchait des livres sur l'aviation pendant la Seconde Guerre mondiale. Marquer ma page avec cette petite main, c'est, autant que d'acheter des livres d'occasion ou d'aller à la bibliothèque, m'inscrire dans la communauté des amoureux de la lecture.


Des marque-page, on m'en a offert un certain nombre (cadeau très courant qu'on fait aux gros lecteurs, quand on ne leur offre pas un bouquin). Aucun n'a remplacé ce petit objet désuet.


9 commentaires:

  1. Quel objet charmant ! Effectivement peu importe qu'il soit fait de matériaux peu précieux, sa vraie valeur est ailleurs. Ne craignez vous pas de le perdre en l'emmenant partout ? Avec ces objets familiaux plein d'histoire, je suis toujours partagée entre l'envie de m'en servir et le besoin de les voir enfermés dans une vitrine ou un tiroir...
    PCR

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  2. On a tous un object qui nous vient de notre passé et nous accompagne vers notre futur.

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  3. C'est très original, je n'en avais jamais vu de semblable. Ca date de quand ?

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  4. > PCR :

    si, j'ai même cru une fois l'avoir perdu mais je l'ai retrouvé au fond de mon sac à main. En fait, quand je l'ai avec moi, je vérifie toutes les trente secondes qu'il est là...


    > Mr K :

    C'est vrai :)


    > Athéna :

    Pas la moindre idée précise ! Je l'ai toujours vu entre les mains de ma grand-mère et je crois qu'il remonte à sa mère (mon arrière grand-mère, donc).

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  5. J'aime beaucoup votre propos sur l'opale : c'est une pierre "couleur du temps" ?

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  6. En guise d'objet du passé, j'ai toujours à l'annulaire droit un petit dizainier en argent, très fin et irrégulièrement travaillé, offert par une Polonaise qui avait brièvement logé chez moi lors d'une escale pour les JMJ de 1997 à Paris. C'est un cadeau étonnant de la part d'une jeune fille qui n'avait pas grand-chose, et je sais que c'était sans doute là une de ses seules richesses ; et de plus il est si étroit qu'il aurait très bien pu ne pas me convenir... Anna ne fait pas partie de mon passé familial ancien, mais j'avais 6 ans, elle 19 ; j'ai aujourd'hui l'âge qu'elle avait alors et le souvenir qu'en deux jours elle a réussi à me laisser, de son sourire merveilleux et de sa joie profonde, me rappelle de temps en temps la fille que je veux être et devenir.
    Et moi qui ai mis tant de temps à accepter de prier avec Marie, je sais pour plusieurs raisons qu'elle a veillé sur moi.

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  7. C'est tellement toi, cette petite chose désuète ;-)

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  8. > Geneviève,

    je ne sais pas, je n'y connais rien. Je vous aurais bien montré une photo mais la bague est chez mes parents, bien au chaud. Elle est plutôt blanche, avec des reflets principalement orange, verts et bleus clair.
    La pierre est très belle en elle-même, mais la monture (en navette, sur or rose) n'est pas trop dans mes goûts. N'empêche, je suis sûre que cette bague est magique ;)


    > Anonyme :

    Comme je vous comprend ! C'est une très belle histoire ! Pour ma part, je ne me sépare plus depuis un an de ma médaille commémorant la venue du Pape à Paris, et de mon chapelet acheté (et béni) à Saint-Benoît sur Loire. Ils ne quittent pas non plus la poche cachée de mon sac à main !


    > Sémiramis :

    Je savais que ça te plairait, chère collaboratrice !

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  9. Tiens, à propos de petite chose désuète, vous me faites penser que je dois prendre rendez-vous avec mon urologue.

    (Oui, oui, je sais...)

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