mardi 7 décembre 2010

France 1500...




Je m'aperçois que ça fait bien longtemps que je n'ai pas descendu en flèche (gratuitement, mauvaise foi comprise), une exposition parisienne.

Voici donc ma dernière excursion en date : France 1500, au Grand Palais.


Je n'aime pas beaucoup aller au Grand Palais. C'est cher, mal fichu, et en plus il est tout à fait impossible de boire un café dans le coin.
Cher, oui. Plus de 10 euros l'exposition, plus un euro la réservation - réservation obligatoire bien entendu, c'est la grande astuce du Grand Palais : on limite le nombre de place, comme ça la France entière se met à vouloir y aller. Résultat, vous avez de braves gens qui se retrouvent à faire la queue à l'entrée dès huit heures du matin, sous le froid, la neige et la pluie. Tout ça pour les Nymphéas de Monet - j'ai rien contre Monet en soi, mais il y a des limites.

Dieu merci, l'amie avec qui j'avais prévu d'y aller avait pris les places pour un vendredi après-midi, donc point de populace à l'horizon - c'est que je veux bien mourir pour le peuple, mais je ne veux pas mourir avec.


Nous étions donc convenues d'aller voir "France 1500", en nous souvenant avec émotion du jour où un commissaire d'expositions a eu une inspiration géniale en baptisant son expo au Louvre "Paris 1400" - une expo où on voyait des trucs qui brillent avec de l'or et des pierres précieuses, des tas de volumes des Grandes Chroniques de France et des gisants un peu trash - appelés transis.



Depuis, tout le monde s'y est mis : on prend n'importe quel nom de ville et on colle une date derrière, vous avez votre sujet d'exposition. On a eu aussi France XIIe siècle (bah oui, on a moins de choses donc on a le droit d'élargir un peu) et Vienne 1900, par exemple. J'attends avec impatience Hiroshima 1945, Lons le Saunier 1977, Melun années 1930, Vitry le François 1984 - lieu et année glorieuse de ma venue au monde.

De toute façon, maintenant, les expos, c'est ça ou le thème "deux artistes mis ensemble", genre Matisse/Rodin, dont j'ai déjà parlé.


Je préfère ne pas m'énerver sur la foutue tendance des commissaires d'expo à faire en sorte que les cartons devant les oeuvres soient rédigés en ocre-beige sur fond grisâtre, avec éclairage à la LED blafarde directement braqué dessus. Et bien sûr, écrit en petit. Histoire d'être bien sûrs qu'on ne pourra jamais les lire.

Je préfère ne pas m'étendre sur le fait que les vitrines, contrairement au conservateur du Grand Palais, réfléchissent. C'est embêtant, parce que quand je veux regarder une enluminure, je n'ai pas besoin de voir ma pomme en face de moi - je la vois assez comme ça le matin dans la glace, merci.

Enfin, dans la série "évitons de réfléchir, des fois que ça nous morde les doigts de pieds", mentionnons l'agaçante propension à coller des oeuvres les unes à côté des autres sans aucune perspective. La première partie de l'expo, ainsi, consiste bêtement en un tour de France des arts autour de 1500, région par région, et paf ! Débrouillez-vous avec ça. Sur le mode : et dans le Périgord, on fait des Vierges à l'Enfant. À Toulouse, on fait des Vierges à l'Enfant. Et en Provence, on fait des Vierges à l'Enfant. Et en Normandie ? On fait des Vierges à l'Enfant. Et à Paris ? Devinez ?

On regrettera également la navrante banalité du discours - alors euh, voilà, euh, il y a des archaïsmes, mais euh aussi, bah, des influences italiennes renaissantes, quoi... On aurait apprécié un peu plus de réflexion sur le fait que, justement, le décrochage de cette période est intéressant, parce qu'on passe d'une foi et de canons artistiques unanimes - "l'art gothique", pour aller vite - aux influences renaissantes qui touchent les élites et les franges supérieures de la société - à mettre en parallèle avec la cassure religieuse du début du XVIe siècle. J'aurais aimé davantage d'insistance sur le fait que même François Ier prie devant des statues gothiques tout en appréciant Léonard de Vinci et les femmes à poil des peintres italiens.


Mais tout ça vaut le détour, quand même. En vrac, coups de coeur pour des desssins d'architectes sur parchemin, le tombeau des enfants d'Anne de Bretagne, le portrait de François Ier en Saint Jean Baptiste (eh oui ! on ne peut pas se tromper, François Ier étant reconnaissable entre mille), les vitraux inspirés de représentations de "triomphes" italiens connus par exemple via les cartes de tarot - l'histoire de la carte à jouer me met en transes -, le portrait en grisailles de Jean Fouquet, le tableau représentant Pierre de Beaujeu, Madame son épouse (Anne de Beaujeu, qui a l'air aussi agréable à vivre que maîtresse femme) et leur fille encore au berceau, la Nef de Sainte Ursule - superbe pièce d'orfèvrerie, et quelques éléments architecturaux du château de Gaillon, notamment les fontaines portant l'emblème de Louis XII.

Emblème qui est, je ne me lasse pas de le répéter tellement c'est bête, le porc-épic.

Les rois de France n'étaient pas toujours très inspirés, il faut bien le dire.





8 commentaires:

  1. Et la salamandre de Francois Ier alors ?;-)

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  2. > Euterpe,

    Elle y est aussi !
    mais le porc-épic, c'est encore plus rigolo - en plus, je me demande si Louis XII a déjà vu un porc-épic de sa vie.
    en tout cas, pas le sculpteur, si j'en juge d'après la tête des porcs-épics des fontaines du château de Gaillon.

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  3. A Paris chère Artémise, on ne fait pas des viregs à l' enfant mais des Delanoë à l'enfant, nuance!

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  4. Très intéressant tout ça. Et en plus, j'ai bien ri en lisant vos deux derniers articles. Si en plus La Poste et la bouillotte s'y mettent...

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  5. Il y a eu Lyon 1562 aussi.

    En fait, ça donne plutôt envie d'aller voir, ton billet. Et comme je ne bosse pas le vendredi après-midi...

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  6. > Grandpas

    je ne sais pas, je ne vais pas aux expos de la mairie de Paris :)


    > Floréal,

    L'expo est très bien, si vous tombez sur le catalogue, il est encore mieux (les articles sont de grande qualité) !
    (mais j'ai une nouvelle bouillotte maintenant).


    > Louxhor,

    Non mais elle est bien, cette expo, quand même. Ce qui est gonflant, c'est la mode des "ville + date"...

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  7. Ce billet est un sommet de mauvaise foi réjouissante! ;-) On se régale et on sent que tu t'es amusée à l'écrire. Mais c'est malin parce que:
    1/ j'ai encore plus envie d'aller la voir maintenant
    2/ j'ai une amie en moins avec qui aller voir l'expo (mon mari souffre du syndrome Pitti, c'est fâcheux)
    Groumph.

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  8. Artémise

    Pas simplement aux expositions de la Ville mais partout car avec son air de Rosière, il a tout d' une vierge et pour les enfants, tout se loue !

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Soyez gentils, faites l'effort de signer votre message - ne serait-ce que dans le corps d'icelui, si vous ne voulez pas remplir les champs destinés à cet effet - c'est tellement plus agréable pour ceux qui les lisent...