vendredi 26 août 2011

Sexisme à deux balles ou bêtise confondante ?


Les gens sont tout de même assez peu fins. Même des gens gentils, sympas comme tout, qui veulent avoir un bon mot pour vous faire sourire et se trouvent agréables, peuvent avoir un don spécial pour sortir d'énormes conneries.

Par exemple, n'avez-vous pas remarqué un phénomène étrange ? Lorsqu'une femme relativement jeune et sans enfants prend dans les bras le mioche nouveau-né d'une amie, et ce quelle que soit la raison (permettre à la copine de boire son thé tranquille ou juste le prendre parce qu'on aime bien les mioches), on entend le mec d'icelle prendre un air désolé et dire au mec de la première "ah bah maintenant, tu vas être obligé de lui en faire un, hein, elle va réclamer".
Et là, mis à part traiter le mec de gros connard de macho (et accessoirement vous fâcher à mort avec les amis en question, ce qui n'est pas forcément le but lorsque ces gens vous invitent chez eux), que voulez-vous faire ?

Lui expliquer patiemment que femme ne signifie pas forcément hystérique ? Qu'une fille peut fonctionner autrement que sur le mode "je vois-je veux", qu'il s'agisse d'une paire de chaussures ou d'un enfant ? Que les femmes peuvent aussi savoir raisonner et gérer toutes seules comme des grandes la question du désir d'enfants et la possibilité d'en faire ?

Lui faire remarquer que si c'est la raison pour laquelle lui-même s'est reproduit, c'est bien dommage pour lui ? Que la conception d'enfants dépasse probablement la simple notion de coup de bite destiné à combler le caprice de Madame un samedi soir après avoir pris dans ses bras le mioche de sa copine ? Qu'un homme aussi peut désirer d'être père ?

Pire encore, la réflexion peut venir aussi (mais moins souvent) de la fille.


Mais qu'ils sont cons. Mais qu'ils sont cons.






jeudi 25 août 2011

(non-billet)




Ah, si la politique m'intéressait, si je lisais avec soin le Courrier international et le Monde diplo... ce serait chouette, parce que j'aurais pu faire un billet sur la Libye et la déconfiture de Khadafi. Malheureusement, ce ne sera pas le cas.

Et c'est fort dommage, parce que j'avais trouvé un magnifique titre.


"Tripoli pour être honnête".



Mais comme je n'ai rien à mettre sous cet intitulé, je me contente de vous livrer ce jeu de mot pourri de mon cru personnel, dont je suis extrêmement fière vu que je me fais moi-même rigoler avec.

Vous en ferez ce que vous voudrez.




jeudi 11 août 2011

Paris révolutionnaire, 2. La rue des Colonnes.




Il y a peu d'exemples d'architecture révolutionnaire en France. D'abord pour une raison toute simple : on avait d'autres chats à fouetter. On ne peut pas toujours tout faire, démonter la Bastille d'un côté, pondre la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, courir après les prêtres réfractaires, et construire des trucs.
Donc on s'est plutôt attachés à investir les lieux déjà existant. C'était bien pratique, avec tous ces nobles émigrés, ça faisait de la place.
Et puis après la Révolution, pensez bien qu'on s'est attaché à vandaliser comme des perdus les rares souvenirs architecturaux de cette époque.

Si vous voulez voir de l'architecture révolutionnaire, il y en a quand même un peu. Le monument Sec, par exemple, à Aix en Provence : il faut sortir un peu du centre-ville mais c'est à cinq minutes de la cathédrale (et à deux minutes du parking où vous vous garez pour aller à la cathédrale) alors au lieu de chercher à acheter des places de festival hors de prix, allez plutôt visiter le monument Sec. Vous m'en direz des nouvelles.
Et pour ceux qui n'auront pas l'occasion d'aller à Aix pendant les vingt prochaines années, voilà de quoi satisfaire votre curiosité intellectuelle : ici.


L'autre exemple, qui est celui dont j'étais partie pour vous causer, est la rue des Colonnes, à Paris, deuxième arrondissement. Il faut être au courant mais si vous êtes comme moi un compulsif des panneaux marron de la mairie de Paris (qui vous informe aimablement des curiosités au fil des rues), vous apprendrez que cette petite rue entre les stations de métro Quatre Septembre et Bourse, eh bien, c'est l'un des rares restes architecturaux de la Révolution.

C'est une jolie rue bordée d'arcades avec un décor antiquisant mais qui fait plus temple d'Abou Simbel que chapiteau corinthien. Jugez plutôt (les photos ne sont pas de moi, j'ai perdu les miennes. Moi au moins j'avais réussi à cadrer un truc potable. Mais eux, il savent garder les photos, alors...)




En fait, les colonnes à palmettes sont censées être inspirées du temple de Paestum. C'était du moins l'idée de Nicolas Jacques Antoine Vestier, l'architecte qui dirigea d'abord le chantier.

Pourquoi une rue à colonnes ? D'abord parce que les colonnes, ça fait antique, et qu'au moment de la Révolution, tout ce qui est antique est trendy. Ensuite, il s'agissait tout simplement de mêler efficacement habitant et commerce, histoire que les gens pussent faire leur shopping sans être trempés. Comme on l'avait déjà fait place des Vosges ou dans les galeries du Palais-Royal. Cela se faisait déjà aussi très bien en Italie du Nord, par exemple. Par la suite, l'idée a fait son petit chemin et a abouti, à Paris, à la rue de Rivoli, mais aussi plus tard à la floraison de passages couverts dans le Paris du XIXe siècle. L'idée est d'avoir des commerces au rez-de-chaussée, et un habitat bourgeois à l'étage avec tout le confort qu'on pouvait rêver à l'époque : dans chaque immeuble, un appartement différent à chaque étage, séparé, avec cuisine, cabinet de toilette, garde-robe, internet par fibre optique, salon et chambre. Le premier étage est l'étage noble avec une pièce supplémentaire qui sert de salle à manger. Cette pièce supplémentaire a été obtenue en plaçant la cuisine dans l'entresol.

Le chantier qui ne fut pas de tout repos. Entre condamnations à mort d'un des entrepreneurs, un autre qui a dû se faire discret pour éviter de passer au rasoir national, et les ennuis financiers des investisseurs, les rebondissements sont nombreux. Les détails sont extrêmement bien racontés sur la page wikipedia à laquelle je vous renvoie car l'article y est à ma foi tout à fait convenable : ici.


La rue des Colonnes a souffert par la suite de l'haussmanisation de Paris : mutilée par le percement de la rue de la Bourse puis celle du Quatre Septembre, il a été question de la reconstruire à l'identique au moment du Bicentenaire de la Révolution. Le projet dort encore dans les cartons de la Marie de Paris et des Monuments historiques, avec d'autres projets farfelus : la reconstruction du palais des Tuileries, celle du château de Saint Cloud... Après tout, il est toujours permis de rêver !




mercredi 3 août 2011

Une femme de la Renaissance (tag d'Euterpe)

(voir le tag lancé par Euterpe !)





Si je devais choisir une femme de la Renaissance, je choisirais Isabelle Claire Eugénie d'Autriche, infante d'Espagne. D'abord parce que l'Espagne est la mal-aimée de l'histoire moderne, systématiquement taxée de bigoterie, assaisonnée de tas de vilains inquisiteurs tout chauves et tout crasseux, d'autodafés de juifs et de morisques à tous les coins de rues, et de cohortes de malheureux gens supposément frustrés par les susnommés vilains inquisiteurs. Et moi, j'aime bien l'Espagne du Siècle d'Or.

D'ailleurs, c'est facile de reconnaître les Espagnols dans les fictions et docus-fictions historiques : c'est ceux en noir, chauves à l'air très très vilain. Et ils veulent brûler tout le monde.

Parmi les Espagnols, il y en a un qui remporte la palme du gros vilain, c'est Philippe II, roi d'Espagne de 1556 à 1598. Dans les films, il fait toujours très peur. Alors que pourtant, même si le bonhomme n'a pas toujours l'air guilleret sur ses portraits, il n'y a pas non plus de quoi s'effrayer.

C'est peut-être lié à son chapeau ?

Pour ma part, j'ai une grande sympathie pour Philippe II - un peu moins pour son système de gestion des finances de l'Etat (= la banqueroute permanente, mais rien n'est parfait en ce bas monde). Si un jour vous avez comme moi l'heur de visiter 1 le Prado à Madrid et 2 l'Escurial à quarante bornes de Madrid, vous comprendrez sûrement mieux l'essence de ce grand roi, mécène éclairé (chez lui, il y avait aussi bien du Jérôme Bosch que du Greco), croyant sincère, politique rusé mais aussi homme d'une grande complexité, bon père de famille, époux aimant, ami affectionné pour les rares qui lui étaient vraiment proches.

Comme je vous le disais, il n'a pas non plus l'air spécifiquement marrant.
La légende veut qu'il n'ait ri qu'une fois dans sa vie.
En apprenant le massacre de la Saint Barthélemy.


(sans déconner : il faut avoir visité l'Escurial une fois dans sa vie.)



Philippe II n'a pas eu de chance dans sa vie matrimoniale : marié une première fois, il eu pour fils le fameux Don Carlos (celui de l'opéra de Verdi), puis il s'est marié une seconde fois, un peu pour la déconne, avec la reine d'Angleterre Marie Tudor. La troisième fois, avec Elisabeth de Valois, qui avait bien vingt ans de moins que lui et qu'il aima sincèrement. Lorsqu'elle mourut, elle lui laissa deux filles dont l'une est celle qui m'intéresse, Isabelle Claire Eugénie, née en 1566. (Ensuite, il s'est encore marié une quatrième fois, histoire d'avoir enfin un héritier : ce qui a fini par marcher).

Isabelle Claire Eugénie et Catherine Michèle, infantes d'Espagne.
Par Sofonisba Anguissola.



L'autre raison qui me fait aimer Philippe II, c'est que dans sa sagesse, il savait déceler l'intelligence chez les gens. C'est la raison pour laquelle il préféra toujours ses deux filles issues de son troisième mariage. La naissance de l'aînée, Isabelle Claire Eugénie, lui causa dit-on une grande joie, plus encore que s'il lui était venu un fils. L'affection qu'il porta à sa fille et à la soeur d'icelle, Catherine Michèle, ne se démentit jamais au fil des années.

Catherine Michèle, la petite soeur.
Par Sofonisba Anguissola (1577)
Mais vous avez VU ce portrait ? Ces yeux ?

Philippe II aimait la compagnie de ses filles au point de les garder avec lui pendant ses séances de travail. Plus tard, elles se mirent à l'assister en lui traduisant des documents - car il leur fit donner une excellente éducation. Chose qu'il ne permettait pas à ses fils (qu'il prenait pour des imbéciles, et apparemment, il n'avait pas tort).

Philippe II avait de grandes ambitions pour ses filles : ainsi il manoeuvra pour pousser Isabelle Claire Eugénie sur le trône de France à la place d'Henri IV. Ce qui ne fonctionna pas (c'est là qu'on ressortit la fameuse loi Salique, vous savez, celle qui excite encore tant les royalistes d'aujourd'hui), mais cela nous montre surtout que pour Philippe II, c'était pensable et envisageable. Donc qu'il était probablement drôlement moins macho que ses contemporains.

Isabelle Claire Eugénie par Juan de la Cruz, en 1599.
L'étoffe d'une reine : elle est représentée debout.



Isabelle Claire Eugénie dut renoncer au trône de France, mais fit néanmoins une belle carrière. On lui fit épouser en 1599 son cousin Albert d'Autriche et son père la nomma gouverneur des Pays Bas espagnols. Avec pour mission de pacifier la région, en grand chambardement politico religieux depuis alors trente ans. Il y avait une feinte derrière ce mariage : Albert était nommé gouverneur des Pays-Bas alors en pleine révolte et soutenus par la France et l'Angleterre. Le conflit avait plus ou moins pris fin avec la paix de Vervins et Philippe II avait choisi d'octroyer leur indépendance aux Pays-Bas avec à leur tête Albert lequel est marié à Isabelle-Eugénie, sa fille aînée qui apporter à son mari, par sa dot, les Pays-Bas. Or une clause du traité de Vervins précise que si le couple venait à s'éteindre sans descendance, les Pays-Bas redeviendraient possession espagnole. Or, il était assez vraisemblable qu'Albert était incapable d'engendrer, et Isabelle Claire Eugénie étant alors âgée de trente-trois ans, fallait pas rêver... Cette indépendance généreusement octroyée n'est qu'un tour de passe-passe politique permettant aux Pays-Bas de retrouver la paix avant de retourner à la couronne espagnole (vous avez vu comme c'est chouette la politique ?).

Ce fut néanmoins un mariage heureux et redoutablement efficace, qui rétablit la paix dans la région, réforme la justice, développe l'économie, en suscitant des grands travaux (en particulier) l'assèchement des marécages à la frontière de l'actuelle Flandre orientale et de la France. Ils installent leur cour à Bruxelles et s'entourent d'artistes, Brueghel ou Rubens. La mort d’Albert survient en 1621 mais n'empêche pas Isabelle Claire Eugénie de rester comme seule gouvernante des Pays Bas espagnols. Veuve éplorée, elle prend alors l'habit de Clarisse et continue de diriger la région d'une main de fer dans un gant de velours.

Isabelle Claire Eugénie en habit de clarisse.
D'après Rubens.

Elle meurt en 1633 : c'est la fin d'une période de calme et d'essor pour les Pays Bas Espagnols, qui ne se calmeront de nouveau qu'en 1648, lors des traités de Westphalie.





lundi 1 août 2011

L'énervement du lundi.


Au risque de me faire lyncher par nombre de mes petits camarades, j'avouerai ici haut et fort que s'il y a bien un chanteur dont je ne supporte plus l'encensement régulier, c'est bien Brassens.

"un antimilitariste convaincu" : position très originale après la guerre de 39-45, cela va de soi.

"contre la peine de mort" : euh, oui, "Gare au gorille"... certes. Victor Hugo, lui, a fait Le Dernier Jour d'un condamné. Pas tout à fait le même calibre.

"la non-demande en mariage" : "ah mais tu comprends, c'est magnifique, il était tellement contre l'autorité patriarcale du mariage qu'il n'a jamais épousé sa femme". - "bah non c'était justement pas sa femme" - "oui enfin sa compagne" - "c'était pas sa compagne non plus, ils ne cohabitaient pas" - "oui bon son amour, quoi" - "ouais... ou alors tu considères comme moi que c'était juste un mufle qui voulait bien baiser de temps à autres avec sa gonzesse, mais surtout pas s'embarasser d'elle". - "...".

"contre la bourgeoisie bien-pensante" : "tous ceux qui ne se roulent pas de grosses galoches sur les bancs publics, c'est rien que des vilains frustrés, et toc".


Brassens, c'est un peu comme Coluche : ils n'ont jamais fait que taper sur des sujets sur lesquels tout le monde tapait déjà. La bourgeoisie, l'Eglise et l'armée. Extrêmement risqué, quoi.


Je veux bien que les chansons de Brassens ne soient pas désagréables voire rigolottes, mais qu'on en fasse un parangon de la lutte pour la liberté, non possumus. Faut-il avoir une piètre conception de la liberté...