lundi 18 octobre 2010

Les romans facebook : Quatuor, de Vikram Seth.


Comme je n'ai jamais pu emprunter Un garçon convenable, de Vikram Seth, que tout le monde m'avait conseillé - manifestement très demandé à la médiathèque de la banlieue pour riches - j'ai fini par m'emparer de Quatuor, du même.

Je n'aurais pas dû car je me suis considérablement ennuyée à lire les déboires d'une tête de con de violoniste pénible et hystérique, qui a plaqué dans sa jeunesse sa bonne amie (pianiste de son état) - d'une manière infiniment élégante, à savoir ne plus donner de nouvelles du jour au lendemain, et la retrouve dix ans après, mariée - c'est pas de chance.
La tête de con hystérique essaie de recoller les morceaux mais évidemment, ça rate - car la dame trompe joyeusement son époux et puis finalement s'en veut - et un peu de culpabilité judéo-chrétienne à deux roubles pour pimenter tout ça. Un peu de Guide Bleu, aussi - ça se passe à Venise à un moment. Et en plus, la pianiste est devenue sourde - et un peu de tragédie racinienne pour nous faire gober que c'est d'la grande littérature, ça, madame.

Le tout pour faire savant croule sous les termes techniques les plus raffinés, parce que l'auteur veut nous expliquer qu'il a lu La musicologie pour les nuls. J'ai lu après coup que le bonhomme avait (ou avait eu, j'ai pas bien compris) un compagnon musicien, ça doit être un traumatisme fondateur.

Je connais mal le milieu de la musique. Je connais très mal la musique en général, et c'est pas faute d'avoir tapé sur un piano du CP à la Terminale, avec des résultats assez peu glorieux, il faut bien le reconnaître. Aussi les déboires d'un quatuor qui se demande s'il vaut mieux jouer du Schubert en ut bémol majeur avant du Beethoven en la majeur m'ont-ils laissée totalement froide. Et la représentation des musiciens soit homosexuels pénibles et pleurnicheurs (sur le coup je me suis demandée si le type avait déjà rencontré un homosexuel dans sa vie, c'était avant que j'apprenne qu'il l'était lui-même, ce qui n'a pas laissé de me surprendre) soit hétérosexuels pénibles et pleurnicheurs, suffisamment exaspérante pour avoir envie de souffler au personnage principal quelque chose comme "mais on s'en fout, mon brave".

Pourquoi parlais-je plus haut de "roman facebook" ? C'est parce que ce genre de bouquins où on ne comprend pas pourquoi les gens se déchirent, se réconcilient, s'engueulent, s'adorent, se trompent ou couchent ensemble, me fait penser aux conversations de jeunes gens dans le métro, à base de textos, de statuts facebook et d'envois d'e-mails aux enjeux infiniment compliqués. Et à les écouter, vous ne parvenez pas à comprendre pourquoi tel statut facebook a entraîné une brouille mortelle, une rupture ou une coucherie. D'ailleurs vous ne voyez même pas le rapport entre ledit statut et ce qui s'est ensuivi, mais manifestement, tout ça est très grave.

Ou débile et dérisoire.

Eh bien voilà. Je n'ai pas compris pourquoi jouer La Truite et l'Art de la fugue étaient aussi importants pour cette histoire d'adultère - et en plus, je m'en fous. Je n'ai pas compris pourquoi on passait, au détour d'une phrase anodine, de l'adultère passionné à la culpabilité déchirante. Pourquoi à la page 245 on se roule des palots dans une église vénitienne, et à la page 246 on pleure sur son cas et on décide de rompre. Et je n'ai pas compris pourquoi c'était grave, du reste.


Ou alors c'est juste que les gens sont tous pénibles et pleurnicheurs ?

ça expliquerait pas mal de choses sur ce que j'entends quand j'ai les oreilles qui traînent dans le métro.

9 commentaires:

  1. Eh bien, en voilà un qui est habillé pour l'hiver ! Je ne le connais pas et pense du coup me maintenir dans cette saine ignorance.

    Je retourne à Harry Mulisch et à sa Découverte du ciel...

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  2. Vous faites bien, ce truc est tout à fait dispensable.

    Allez, soyons "sympas", accordons-lui UNE scène réussie, celle où la tête de con, dans le bus, aperçoit son ex dans le bus qui arrive en face. Elle bouquine et ne le voit pas. Lui tambourine sur la vitre du bus pour essayer d'attirer son attention...
    LE seul moment où on se prend à vibrer pour qu'elle lâche son bouquin, qu'elle le voie enfin.

    Mais ça fait deux pages sur tout le livre, donc très mauvais rapport poids-qualité-prix.

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  3. Ne serait-ce pas une sorte de succédané de votre roman:
    http://www.youtube.com/watch?v=Q24qnmpbdOU

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  4. Oui, ça doit être ça ;)
    merci pour ce grand classique de la chanson française !

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  5. Bonjour, je ne fais que passer sur ce blog mais je peux vous conseiller, en matière de lecture et si vous me le permettez, "Sarnia" de Gerald B. Edwards (le seul livre qu'il ait jamais publié, ayant souhaité qu'on brûlât tous ses manuscrits après sa mort, ce qui hélas fut fait).
    Ou encore "Suite française", d'Irène Némirovski, qui décrocha le Goncourt à titre posthume. En effet, "Suite française" est un roman inachevé, du fait que l'auteur fut déportée avant d'avoir pu l'achever. L'action se déroule au début de la Seconde Guerre Mondiale et dépeint la société française lors de la défaite de 40 puis sous le début de l'Occupation. Fait curieux, l'auteur, bien que juive elle-même, ne mentionne pas du tout les déportations dans son roman. Nous sommes loin donc de la série "Un village français", bien que la deuxième partie du roman se passe, justement, dans un village français... Et c'est ce qui donne son charme à ce roman. Dommage qu'il n'ait pas été achevé.
    Voilà, deux idées de lecture pour agrémenter vos longues soirées de l'hiver à venir... Je vous conseille sincèrement de les lire, ce ne sont pas des romans ordinaires, quoique parlant de gens très ordinaires. J'espère en tout cas que vous aimerez.
    Sinon, rien à voir mais je me suis permis de parcourir votre blog et je tenais à vous féliciter pour sa tenue ainsi qu'à vous remercier pour m'avoir fait découvrir le XVIIème siècle, que je ne connaissais pas du tout. Je le considère depuis avec beaucoup plus d'intérêt. De plus, vous présentez des bouquins au fil de votre blog et ça me donne envie de les lire. Du coup, je me suis permis de vous rendre la pareille.
    Bonne continuation bloguesque et j'espère bonne lecture,

    Un anonyme qui s'excuse d'avoir été si long...

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  6. Bouh... j'en viens à avoir presque des remords de l'avoir mise sur la piste de Vikram Seth. Avais-je des goûts aussi pourris que ça au lycée ? (ma lecture d'un Garçon convenable remonte à cette lointaaaaine époque. Aïe.)

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  7. Anonyme,

    merci pour vos conseils et vos encouragements.
    D'Irène Némirovski, j'ai déjà lu quelques livres, en particulier David Golder (l'histoire de la déchéance physique et morale d'un banquier juif très riche), qu'on m'avait prêté il y a quelques temps, j'avais beaucoup apprécié ce livre.


    > La souris,

    non mais tu n'y peux rien ;)
    Un Garçon convenable, tout le monde m'en dit du bien, mais il est victime de son succès : impossible de le trouver à la bibliothèque !

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  8. Merci beaucoup pour cette critique.
    Je ne partage absolument pas votre avis, étant moi-même musicienne et relisant avec un plaisir toujours renouvelé ce roman.
    Mais l'énergie que vous mettez dans la recherche des travers du roman serait capable de me faire changer d'avis, si je m'étais moins attachée à l'histoire du narrateur qu'aux multiples événements annexes qui font la musicalité du livre !

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  9. > Aloysia (désolée du temps de latence mis à vous répondre)

    Il est vrai que pour un non-musicien comme moi (enfin, j'ai tapé sur un piano avec application une demi-heure tous les soirs pendant douze ans), une partie du roman est quelque peu difficile à comprendre, on est assez vite largué par les problématiques liées à la musique.

    Cela dit, depuis la lecture de ce roman, je n'écoute plus La Truite de la même façon !

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Soyez gentils, faites l'effort de signer votre message - ne serait-ce que dans le corps d'icelui, si vous ne voulez pas remplir les champs destinés à cet effet - c'est tellement plus agréable pour ceux qui les lisent...