lundi 1 août 2011

L'énervement du lundi.


Au risque de me faire lyncher par nombre de mes petits camarades, j'avouerai ici haut et fort que s'il y a bien un chanteur dont je ne supporte plus l'encensement régulier, c'est bien Brassens.

"un antimilitariste convaincu" : position très originale après la guerre de 39-45, cela va de soi.

"contre la peine de mort" : euh, oui, "Gare au gorille"... certes. Victor Hugo, lui, a fait Le Dernier Jour d'un condamné. Pas tout à fait le même calibre.

"la non-demande en mariage" : "ah mais tu comprends, c'est magnifique, il était tellement contre l'autorité patriarcale du mariage qu'il n'a jamais épousé sa femme". - "bah non c'était justement pas sa femme" - "oui enfin sa compagne" - "c'était pas sa compagne non plus, ils ne cohabitaient pas" - "oui bon son amour, quoi" - "ouais... ou alors tu considères comme moi que c'était juste un mufle qui voulait bien baiser de temps à autres avec sa gonzesse, mais surtout pas s'embarasser d'elle". - "...".

"contre la bourgeoisie bien-pensante" : "tous ceux qui ne se roulent pas de grosses galoches sur les bancs publics, c'est rien que des vilains frustrés, et toc".


Brassens, c'est un peu comme Coluche : ils n'ont jamais fait que taper sur des sujets sur lesquels tout le monde tapait déjà. La bourgeoisie, l'Eglise et l'armée. Extrêmement risqué, quoi.


Je veux bien que les chansons de Brassens ne soient pas désagréables voire rigolottes, mais qu'on en fasse un parangon de la lutte pour la liberté, non possumus. Faut-il avoir une piètre conception de la liberté...




12 commentaires:

  1. Bonjour Gente Dame,
    Il m'arrive de lire parfois vos missives, et c'est la première fois que j'en commente une car je suis tout à fait d'accord avec ce que vous écrivez sur Brassens. Brassens m'a toujours semblé très misogyne,et plutôt "chiant" comme chanteur mais c'est politiquement incorrect de dire du mal de Brassens. Voilà, pour une fois je me lâche, et je dis ce que je pense de lui. Ca fait du bien.
    Brassens et Paul Valéry ont un point commun : ils sont nés à Sète. Mais l'un (Paul V.) était un vrai poète. Pas l'autre

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  2. Je suis plutôt d'accord avec vous sur le fond, et notamment sur votre parallèle avec Coluche. Parallèle excessif néanmoins : brocarder la police, l'armée, et surtout la Résistance (Les Deux Oncles) dans les années cinquante vous exposait tout de même à lus de remous que dans les années soixante-dix.

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  3. Je suis assez d'accord avec votre réaction. sauf que effectivement comme le souligne Monsieur Goux, Brassens prenait sur certains sujets en son temps certains risques et a parfois eu des positions rares à l'égard de phénomènes populaires comme par exemple la honte de la pratique des tontes de femmes à la libération. Il n'en reste pas moins juste qu'il reste emblématique d'une culture populaire "vulgaire" et facilement libertine et irresponsable à laquelle je ne peux souscrire.

    Là où je ne suis pas d'accord avec le parallèle avec coluche, c'est que ce dernier, c'est vraiment l'apothéose de la vulgarité pas seulement au sens de populaire, du vulgaire, de l'ordinaire ou du commun, mais du vulgaire au sens du "crade", de l'opinion de comptoir lamentable de phallocrates populistes avinés, l'esprit petit bourgeois envieux et rivalitaire de toute autre classe sociale, sans aucun esprit de classe, ni de "classe", l'apothéose de la graisse, du laid, du rire gras, des amalgames, des abus de langages et des trahisons idéologiques : coluche, c'est ce qui a permis l'avènement de la génération sarkozy au pouvoir c'est à dire du "tout est permis" à qui en a le pouvoir sur les autres, qui se redore le blason facilement une fois fortune faite avec une charité artificielle, toujours rivalitaire de celle de longue date pratiquée par les instances sur le dos desquelles il a construit sa fortune.

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  4. Ah ça, tu y vas fort ! Pour citer ces exemples là, en plus, tu as dû au moins tomber sur le Stop ou Encore de RTL ! Si ces baudets voulaient bien se souvenir qu'il a fait plus que trois chansons... Bon, elles ne sont certes pas toutes bonnes, loin de là, et j'en tiens même des vraiment pires en terme de vulgarité à ta disposition, mais il y en a de tellement, tellement mieux !
    Au fond, Brassens, c'est une grosse incompréhension. C'est un type qui a passé le cap de la guerre en se construisant pas mal d'idées arrêtées, sur le pouvoir, l'église, Dieu, les bourgeois, l'armée, tout ce que tu veux, qui a écrit des poèmes dessus, et qui s'est retrouvé à les chanter en public alors qu'au fond il aimait pas tellement ça. Et qui s'est rendu compte, assez tristement d'ailleurs, que ce qui mettait le plus les gens en liesse, c'était d'entendre parler d'un gorille qui se tape un juge (il détestait cette chanson). C'est un type qu'on présente encore aujourd'hui pour ces idées là (ce qui le ferait sans doute bien chier, cf. 'mourir pour des idées" donc), mais dont on s'obstine à diffuser les rengaines les moins élevées, les plus crasse, les plus banales (je te trouve généreuse de voir un brûlot anti bourgeois dans Les bancs publics, quand même, ça va chercher moins loin que ça).
    Alors qu'il a écrit de très, très belles choses (si, moi je trouve que c'est un poète), pas seulement des "rigolotes" (ah, que tu me poignardes en écrivant ça !) y compris pour sa compagne ; là aussi, tu vas vite en besogne, à présenter leur couple comme "Elle, qui aurait bien voulu le marier" - pas facile, elle était déjà engagée ailleurs - et lui, ne daignant l'approcher que pour tirer son coup - elle ne voulait pas non plus vivre avec lui...
    M'enfin bref, au fond, on s'en fout, ce ne sont que des chansons ! Tu auras compris, j'aime Brassens, mais c'est bien que tu n'aimes pas : si oon arrive à se revoir en chair et en os bientôt, on aura un bon sujet de discussion ! (et paf, j'avais prévu de pas en pondre un fromage, et tu vois, tu vois où tu m'entraînes !).

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  5. La compagne de Georges Brassens ne voulait-elle pas elle non-plus "s'embarrasser" de lui ?

    Quant aux frustrés,ce ne sont pas ceux qui ne se bécotent pas sur les bancs publics, ce sont plutôt les femmes, comme le chantait Georges Brassens :
    "
    Quatre-vingt-quinze fois sur cent
    La femme s'emmerde en baisant
    Qu'elle le taise ou le confesse
    C'est pas tous les jours qu'on lui déride les fesses
    Les pauvres bougres convaincus
    Du contraire sont des cocus
    A l'heure de l'oeuvre de chair
    Elle est souvent triste, peuchère
    S'il n'entend pas le coeur qui bat
    Le corps non plus ne bronche pas"

    Il y aurait d'autres choses à dire sur ce billet mais je préfère aller écouter Saturne :
    http://www.deezer.com/listen-1104642

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  6. Refusant d'acquitter la rançon de la gloire,
    Sur mon brin de laurier, je m'endors comme un loir.

    Esprit de Georges.

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  7. Je ne suis pas un admirateur de Brassens de nos jours aurait il tapé sur l' Islam comme il l' a fait sur le Catholicisme ?

    Pour Coluche, je me faisais insulté de tous les noms quand j'osais dire que ces histoires ne provoquaient pas chez moi l'hilarité.

    Christophe,

    Il évoquait ici peut être son vécu ou ses aigreurs devant ma passivité de sa compagne.

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  8. > Ana Maria,

    Contente de vous connaître ! et merci du soutien !
    (moi aussi j'aime Paul Valéry).


    > Didier,

    Oui, c'est vrai. Je reconnais que j'ai été un peu de mauvaise foi.


    > Paul,

    merci beaucoup pour votre commentaire !
    Je serais peut-être un peu moins sévère que vous sur Coluche, mais merci quand même pour votre analyse.


    > Mariette,

    En fait je connais assez bien les chansons de BRassens car j'ai eu des amis très fan qui passaient ça en permanence pendant les week-ends ou les vacances... et puis j'écoute aussi Nostalgie ;) Mais tu as raison, c'est vrai que souvent, on ne connaît que le Gorille, et encore, sans avoir vraiment écouté les paroles - en revanche on le cite à toutes les sauces sur un sujet de dissert' sur la peine de mort.

    Sur le reste, je te suis tout à fait : pour ma part, je n'apprécie pas énormément le chansonnier mais je comprends qu'il n'ait voulu être QUE ce chansonnier, et pas forcément le bon apôtre que beaucoup ont voulu faire de lui.

    Ce qui m'agace, donc, ce n'est pas Brassens en lui-même, c'est la célébration imbécile et malhabile d'un inoxydable "chantre de la liberté" que je ne suis pas sûre qu'il ait été.



    > Christophe, Georges,

    Si vous voulez :)


    > Grandpas,

    Coluche me fait rire de temps à autres, pour ma part. Rire, pas non plus me rouler par terre en hurlant. Pas non plus franchement réfléchir sur la condition humaine...
    Brassens, c'est un peu pareil : pas forcément désagréable à écouter, même si ce n'est pas ma tasse de thé.

    C'est le côté "engagé", qui me gonfle un peu.

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  9. Je vais me laisser aller à l'énervement du samedi. Le brave Georges savait généralement de quoi il parlait. Son côté antimilitariste, il l'a forgé en désertant du STO, et si vous écoutiez bien ses textes, il tape autant sur le militaire que sur le civil capable de mourir pour ses idées. "L'un aimait les Tommies, l'autre aimait les Teutons, moi qui n'aime personne, je vis encore..."

    Son côté anticlérical provenait de son père, libre-penseur, et de sa mère fervente catholique.

    Quant à comparer Georges Brassens à Totor Hugo, comment dire ? L'un a du talent, l'autre non. Totor est une baderne qui n'a vécu que dans le but de recevoir des honneurs (et qui a fuit lorsqu'il ne les a pas reçu pour taper sur Badinguet). Brassens a écrit des textes qui sont largement au-dessus des platitudes de Totor qui pondait des alexandrins creux au kilomètres. Pire, il n'a jamais voulu les chanter. Il n'est monté sur scène chez Patachou au début des années 50 que parce que personne ne voulait chanter ses textes.

    Comparer Brassens et Coluche revient aussi à comparer des pommes et des poires. Les textes de Brassens dans les années 50 et 60 ont été subversifs. Largement plus que ce qu'a pu faire un Coluche dans les années 70 et sans tomber dans la même vulgarité même en parlant des sujets les plus grivois. Même s'il était autodidacte, il était un authentique homme de lettres. Par ailleurs, il ne s'est jamais présenté comme chanteur 'engagé', contrairement à Coluche qui s'était autoproclamé engagé et à Desproges qui était dégagé (derrière les oreilles), certainement pour se moquer du deuxième.

    Et oubliez les quelques titres qu'on entend en boucle sur certaines radios. Écoutez donc (ou réécoutez) la supplique pour être enterré sur la plage de Sète, l'histoire de faussaire, la maîtresse d'école, sans le latin, voire Mélanie. Si tous les textes des brailleurs actuels n'arrivaient qu'à la cheville de ceux de Brassens, je serais vraiment heureux !...

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  10. Victor Hugo avait du talent et Brassens en avait aussi. Simplement, ce n'était pas le même genre. Et il est à mon sens tout à fait normal que certains n'aiment pas l'un et préfèrent l'autre et inversement. Moi, j'aime les deux (mais pas pour les mêmes raisons). :)

    Je voulais juste ajouter que je ne suis pas certaine que Brassens ait vraiment eu l'ambition de tout révolutionner avec ses chansons. Il a eu une vie assez "dissolue" et il défendait certaines idées mais ne les a jamais imposées à personne me semble-t-il. Et il était autant ami avec des curés qu'avec des prostitués, ce qui faisait de lui quelqu'un d'assez tolérant tout de même! En revanche, il n'appréciait pas la bienpensance, que ce soit celle des curés ou celle des résistants communistes (pour faire un grand écart très schématique)...

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  11. > Zzaz,

    Merci d'avoir répondu au Grincheux que j'avais (honte à moi honte à moi) oublié !!

    Vous avez parfaitement raison : justement, je dis que ce qui m'agace, c'est qu'on fasse aujourd'hui de BRassens le champion des valeurs libératoires alors qu'il s'agit d'un chansonnier, pas d'un révolutionnaire.

    En fait, pour tout dire : je ne trouve pas ses chansons désagréables, je les connais même assez bien vu que le répertoire de Brassens est l'une des bases des carnets de chants scouts. J'ai chanté "ma liberté longtemps je t'ai gardée comme une perleuh raaaaareu" et les Copains d'abord, bien volontiers.

    Mais il faut arrêter de le sanctifier.

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  12. "ma liberté longtemps je t'ai gardée comme une perleuh raaaaareu" : c'est d'un autre Georges, Moustaki.

    J'imagine des scouts chanter Hécatombe... Arf'

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